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Artiste Mesa à Tindouf

DU “BEAU ET FONCTIONNEL” DESIGN AUX RUTILANTES PRESSIONS DU STREET-ART Saâdi-Leray Farid.

C’est au Palais Moufdi-Zakaria que le ministre de la Culture dévoilait le 01 juin 2015  l’ossature d’un Conseil national des arts et des lettres (CNAL) mis en place quatre années plus  tôt (le 02 juin 2011). Après celui de mars 2012, le dernier renouvellement confortait la  présidence d’Abdelkader Bendaâmache et voyait l’arrivée de Mebarka Kedouri (danse), de  Safia Yasmina Mazouz, Djamila Talbaoui et Saïd Benzerga (écrivaines et écrivain), de Nawel  Zaàtar (comédienne), de Kaddour Noureddine et Kamel Rouini (acteurs), de Malika Laichour  et Rachid Benallal (réalisatrice et réalisateur), d’Ali Chibane et Rabeh Ouferhat (chanteurs).  Sur les quatorze élus, seul (hormis donc Abdelkader Bendaâmache) Zoubir Hellal Mahmoud  rempilait pour la troisième fois consécutive (Ahmed Takdchout étant quant à lui simplement  reconduit).  

Alors que les autres collèges possédaient souvent deux, voire parfois trois émissaires, il se  retrouvait encore l’unique délégué des arts-plastiques, sans doute en vertu d’un parcours le  conduisant successivement de la Société des Beaux-Arts (1966-1967) à l’École nationale  d’architecture et des Beaux-Arts d’Alger (1967-1970) puis à l’École nationale supérieure des  Arts décoratifs de Paris, là où son diplôme de fin d’études (1970-1974) corrobore une  formation d’architecte d’intérieur(s). C’est en tant que tel qu’il enseignera (de 1990 à 2002)  après son retour au bercail (1976), cela avant de le faire (de 1985 à 2010) au stade de la  section design aménagement & mobilier créée en octobre 1985, soit en même temps que  l’École supérieure des Beaux-Arts d’Alger. Son ancien directeur des études (de 1983 à 1992), revendique (au sein de la biographie adressée aux sélectionneurs de la monstration Afric  design award) être à la baguette d’une transmutation pourtant de la responsabilité de plusieurs  acteurs, parmi lesquels des étudiants et professeurs (ces derniers bénéficiant alors d’une post graduation). Se situant en tant que peintre-designer, l’ex-Essebaghnine se postera également  comme théoricien de l’art, cela en regard à un DEA (Diplôme d’études approfondies) obtenu  en 1988 à l’Université Paris VIII (St-Denis) et suppléé à partir de 2002 d’un magistère en  histoire et théorie des arts (soutenu à l’École supérieure des Beaux-Arts d’Alger). Une année  plus tard, lui sera confiée la responsabilité du département arts plastiques du Commissariat concocté lors de l’Année de l’Algérie en France (Djazaïr 2003), une promotion qu’il utilisera  pour devenir le curateur des expositions Art contemporain Africain, design Africain et  Maghrébin ordonnancées en 2007-2008 au Musée d’art moderne pendant l’événement Alger, capitale de la culture arabe 2007 et en 2009-2010 à l’occasion du second Festival culturel  panafricain. En juin 2012, le désormais président de la Commission nationale d’aide aux Arts  & Lettres (2013-2014) chapeautera la manifestation Designers algériens décidée à l’İnstitut  du monde arabe (İMA) de Paris (clôturée le 16 septembre 2012, elle portait le label  “Cinquantenaire de l’indépendance”) et dirigera au mois de décembre 2014 celle intitulée La  tekhné, l’art du designer. Le catalogue du Musée d’art moderne d’Alger (MAMA) le signale comme son principal scénographe alors que de l’avis de nombreux observateurs,  l’aménagement revenait à Cherif Medjeber qui, arrivé de Paris, concevra une installation  thématique à laquelle participeront Naila et Radia Rahil, Saïd İssadi, Leila Mammeri,  Abdelmounaim Chentir, Amine Belkebir, Walid Bouchouchi, Samir Hamiane, Messaoud İdir,  Mohamed Ourad et Mourad Krinah. Ces protagonistes manieront les articulations d’une  discipline que Mohammed Djehiche comparera (dans le quotident El Moudjahid du 02  décembre 2014) à un « (…) moteur de la création » entraînant « (…) des artistes dont la  démarche s’inscrit dans une ligne fonctionnelle et de beauté ».

Affiliés au confort, au chic symétrique, aux agréments clinquants, séductions policées et apparats ou attraits magnifiés, les réquisits de “fonction” et de “beauté” sont des adjuvants que  les opérateurs à la barre mondialisée de l’art contemporain ont délaissés au profit du choc visuel, de la sédition perceptive, du blasphème, voire du scandale ou tapage médiatique. İls embarquent au sein de leurs prévisions curatoriales des plasticiens qui, composant en dehors  des préoccupations esthético-utilitaristes, conjuguent les insouciances du ludique à des  perturbations sensorielles atteignant parfois les voies de l’imaginaire ou voix de la spiritualité,  des dimensions absentes des médiums d’une génération groupusculaire sous l’influence  controversée d’Hellal Zoubir. Permanent d’un Conseil national des arts et des lettres (CNAL)  habilité à réglementer la situation juridique des créateurs ou à promouvoir et encourager leur  productivité, il a désormais pour prérogatives d’harmoniser des conférences sur les enjeux et  prolongements artistiques de son secteur.  

Sous injonctions du ministre de la Culture, il doit en somme proroger, sous une forme  différente, des “Assises de la culture” prédites en mai 2015. Fractionnés en six ateliers  (patrimoine, livre, cinéma, théâtre, musique et arts plastiques), les “États généraux de la  Culture” (ou “Conférence nationale de la Culture”) avaient pour feuille de route le document  “Pour un programme d’action culturelle structurant”, un fil conducteur censé privilégié « La  multiplication de lieux alternatifs susceptibles d’abriter des ateliers pour la création  artistique ». Nadia Cherabi-Labidi ayant sabordé le décret conservatoire sanctuarisant les Abattoirs d’Alger (qui n’échappaient ainsi donc plus aux lobbies de l’immobilier), son cafouilleux et polémique intermède privera à fortiori les postulants à sa réhabilitation, des  résidences, galeries et biennales prédites corrélativement à l’édification d’un centre de  recherche à même de combler les anachronismes latents d’une historiographie artistique  toujours en jachère. Le tragique décès d’Abdelwahab Mokrani (le peintre s’est suicidé dans la  nuit du mercredi 03 décembre 2014) fut le moment clef d’une alerte rappelant la nécessité de  classer ses œuvres, de constituer un inventaire bibliographique primordial pour tous ses  coreligionnaires (car indispensables à l’archivage mnémonique des avant-corps de la  cartographie spatio-temporelle), de tramer l’itinéraire des figures de proue de la modernité ou  contemporanéité esthétique. 

Les actuels décideurs semblant indifférents, voire rétifs, aux rétrospectives cognitives, le  Groupe de travail sur la politique culturelle en Algérie (GTPCA) tentera de dissiper leurs  habituelles et récurrentes indifférence en convoquant l’ensemble des concernés le samedi 30  mai 2015 au 28 rue Didouche Mourad (domiciliation de l’École “Artissimo”), là où,  accompagnée d’Ammar Kessab et d’Habiba Laloui, Ryma Kerouciha s’engageait à rédiger le  rapport final d’un état des lieux (à entreprendre là aussi discipline par discipline), à livrer «  (…) des données sur les différents espaces d’exposition, de distribution ou d’édition » (un des  axes du “Programme d’action culturelle structurant”), à identifier les réels besoins d’un champ  à l’intérieur duquel Hellal Zoubir berne tout son monde. Toujours en retrait des mouvements  contestataires, il n’a jamais été au devant d’une grève antisystème, a toujours brossé dans le  sens du poil pour se placer à l’intersection des mécontentements, s’immiscer dans les  interfaces consensuelles et enfiler depuis L’Année de l’Algérie en France (2003) les perles de  la notoriété carriéristes et pécuniaires. Plutôt que de s’atteler à mettre sur pieds les débats de la clarification artistique (ligne donc assignée par l’actuel ministre de la Culture), le voilà  maintenant en train de chevaucher le Cheval de Troie qui, l’intronisant « Grand spécialiste du  design », le conduit naturellement à planifier l’exposition Tasmim arabi fi Cirta (création  arabe à Cirta). Programmée dans le cadre de Constantine capitale 2015 de la culture arabe,  elle réunira en octobre 2015 pratiquement les mêmes figurants retenus en décembre 2014 au  Musée d’art moderne d’Alger (MAMA), tous incités à « Donner une nouvelle impulsion à la  dinanderie d’art à travers un renouveau conceptuel et esthétique », annonçait en mai 2015 la responsable de la communication, Zouleïkha Sahraoui (certaines pièces pourraient rejoindre la  monstration en instance à Johannesburg, Afrique du Sud). La trentaine d’intervenants  algériens, tunisiens, égyptiens et irakiens apportera ainsi sa pierre au paradigme de renouveau  dans et par l’authenticité culturelle mis en exergue douze années plus tôt par les conseillers  d’Abdelaziz Bouteflika. Sur le même registre, le premier locataire du Palais Moufdi-Zakaria  exhorte maintenant les agents culturels à aller vers l’Algérie profonde, là où « On trouve dans  les villes de l’intérieur et dans le Sahara des jeunes (…) qui ont des rêves et des ambitions ».  Ce sont ces anonymes que les commissaires Jean-Hubert Martin, Moulim El Aroussi et  Mohamed Métalsi dénicheront en entreprenant (pour la réussite de l’événement, Le Maroc  contemporain débuté le 15 octobre 2014 et prolongé jusqu’au 1er mars 2015) des  investigations à l’intérieur des régions les plus reculées d’un pays dorénavant en avance sur ce  qui est réfléchi et produit artistiquement en Algérie. L’ajournement, sinon le rejet, de notre  projet d’exposition DRAPEAU OSTENTATOIRE démontre en soi que rien de transgressif,  donc de réellement innovant, ne peut surgir dans une contrée phagocytée par des constantes  nationales atrophiant une diversité et une mixité culturelles justement au cœur de la  Constitution marocaine.  

Rédigée en conformité à « (…) ses composantes arabo-islamique, amazighe et saharo hassanie (…), enrichie de ses affluents africain, andalou, hébraïque et méditerranéen », elle découle de l’avis de Jack Lang « (…) d’une lucidité, d’une intelligence politique, culturelle et humaine très rares », si hors du commun « (…) par son esprit d’ouverture, de tolérance, et  par sa créativité » que les fondamentaux énumérés se situent à mille lieues du formatage anti cosmopolite en vigueur en Algérie depuis le Programme de Tripoli de mai-juin 1962. Ses  présupposés parano-essentialistes commandent encore la xénophobie latente des héritiers du  Front de libération nation (FLN) et de ses partis satellites, une constellation ventouse mise en  nébuleuse pour mieux siphonner toutes les nomenclatures et interdire par là même le  télescopage des neurones éprouvant (…) un même esprit (…) de pluralité des expressions »,  précisera, en préambule de la revue Art absolument, le directeur de l’İnstitut du monde arabe  (İMA). İnterrogé plus en avant sur le pourquoi de la manifestation Le Maroc contemporain, il louera les mérites et l’exception d’un territoire qui a « (…) cette singularité de ne pas établir  de cloisons étanches entre l’histoire et le présent ou entre l’artisanat et l’art », une synthèse  que convoite de concrétiser, à l’instar donc d’un renouveau dans et par l’authenticité,  l’attentiste Hellal Zoubir.  

Portant ou s’attribuant par habitude plusieurs casquettes (un travestissement révélateur des  séquelles de la pensée unique léguée par les pourfendeurs et tours de contrôle du Front de libération nationale), il se dit volontiers là expert en photographie plasticienne et ailleurs le promoteur du nouveau design algérien, tire vers lui la couverture de cette autre paternité pour mieux en déshabiller Yahiaoui Mohamed (dit Yamo), Medjeber Cherif et Abdelkader Abdi  (ou encore le dernier venu, Gasmi Chafik). Le trio en est le précurseur, ce que confirme  allègrement une production avec laquelle ne peut aucunement rivaliser un pseudo-parrain dont le coup d’éclat mémorable est d’avoir transformé l’atelier de peinture de Choukri Mesli (celui  que ce dernier occupait auparavant au sein de l’École nationale des Beaux-Arts d’Alger) en  amphithéâtre (depuis détruit), cela au nom d’une prétendue visée conceptuelle a absolument  privilégiée pour faire des étudiants les éventuels penseurs de l’expression du sensible. La  plupart d’entre eux ne sauront ni mener des recherches bibliographiques, donc préparer et rédiger un mémoire leur ouvrant les portes du MLD (maîtrise, licence et doctorat), ni assumer un itinéraire de producteur de formes (la caution “théorie de l’art” servant en vérité à  camoufler cette invalidité), donc d’œuvres insolites, ce qui instruit (et excuse en partie)  l’assertion du directeur du Musée d’art moderne d’Alger (MAMA) arguant le 16 décembre  2013 que « (…), franchement, nous n’avons pas de grands artistes d’art contemporain en  Algérie ».

Réductrice et non argumentée, sa certitude, qui l’amènera à promulguer les expositions Les photographes de guerre: Djounoud en noir et blanc et El Moudjahidate, nos héroïnes, induit  ces interrogations extensives : pourquoi donc vouloir inaugurer les Musées d’art moderne  et/ou contemporain de Constantine et bientôt d’Oran si le vivier des avant-corps  anticonformistes reste si faible ?, si une totale refonde de l’enseignement dispensé à l’École supérieure des Beaux-Arts d’Alger ne met pas le curseur sur le concept d’art-création perverti par ceux de beauté et de fonction, c’est-à-dire par les arbitraires d’une petite communauté de goûts entichée ici de chromos orientalistes et plus loin d’un “renouveau dans l’authenticité  culturelle, révolutionnaire et cultuelle” ? Appréhendée en dehors de la subversion esthétique  et idéologique, l’actuelle recapitalisation symbolique (vivifiée dès 2003) procède d’une stratégie de maintien au pouvoir d’ordonnateurs dont la pensée anhistorique empêche de creuser, dans leur totalité toute bonne, des failles émancipatrices, de soumettre des  problématiques et analyses à même de remédier aux incomplétudes structurelles et  intellectives faisant du pôle “Beaux-Arts” (à identifier ici en relation avec les performances de  peintres, sculpteurs, installateurs ou vidéastes) le parent pauvre de l’Agence algérienne pour  le rayonnement culturel (AARC), un organisme d’abord régi par un Mustapha Orif incapable de commanditer une revue artistique et à la tête duquel se trouve depuis mai 2015 Nazih Benramdane. Commissaire du premier festival de La Musique actuelle (2006, au théâtre de  verdure du Casif de Sidi Fredj), ce communicant de l’Office national de la culture et de  l’information (ONCİ), conseillera le ministre chargé de la Ville, accompagnera plusieurs  délégations de la manifestation Alger, capitale de la culture arabe 2007, présentera le journal télévisé de la “Première chaîne” (où il animera des émissions à caractère politique), administrera en novembre 2008 sa grille parlementaire issue d’une restructuration voulue à l’époque par Hamraoui Habib Chawki, celui là même qui, en tant que ministre de la Culture  du gouvernement de Belaïd Abdesselam, portera les derniers coups d’estocades au  démantèlement du cinéma algérien. Pur produit d’un système de cooptation, l’ex-ambassadeur  d’Algérie en Roumanie et ex-patron de l’Établissement public de télévision algérienne (ÉPTV ou ÉPTA) deviendra à son tour le mentor d’un dauphin missionné pour, ironie du sort, consacrer 80% de ses attentions à un 7ème art intronisé priorité de l’heure par Azzedine  Mihoubi. Le remplaçant de Nadia Cherabi-Labidi constituera en conséquence la commission  susceptible de ramener les Algériens dans les 76 salles (à mettre en réseau et prochainement à  la disposition de plus grand nombre), installera le 24 août Mourad Chouihi (ex-cadre du  ministère en charge du développement des arts et commissaire du Festival international de la  musique diwan) comme directeur général du Centre national de la cinématographie et de  l’audiovisuel (CNCA).  

İnnové par décret en 2004 et se substituant au Centre de diffusion cinématographique, cette  institution adhèrera (aux côtés du Centre algérien du développement de la cinématographie et  de l’Agence algérienne pour le rayonnement culturel) aux opérations “ciné-ville” et “ciné plage”. Respectivement initiées le 20 juillet (à Djelfa) et le 1er août 2015, elles réconciliaient  donc le ou les publics avec le film ou des œuvres récentes (30% ont a prouver de leur cachet  algérien) diffusées en plein air (d’où le terme de “ciné-madina”). Quant aux “salles noires”  jusque-là aux mains des Assemblées populaires communales (APC), celles-ci retourneront  prochainement dans le giron du ministère de la Culture afin de bénéficier des fonds essentiels  à leurs améliorations. Ce “Plan cinéma” conduira à la préemption d’au moins deux salles par  wilaya (soit environ 75) et à leur prochaine gestion par des investisseurs ou distributeurs  étrangers ou algériens disposés à investir dans un domaine absorbant une bonne partie des  fonds spéciaux. Avec un baril en deçà des cinquante dollars, la crise économique oblige  maintenant à serrer les budgets, à rationaliser les dépenses, à geler les projets de quelques  collectivités locales et à concéder une autonomie administrative et financière aux festivals. İl est désormais question de les délester des lourdeurs bureaucratiques, d’attribuer nombre  d’entre eux à des boîtes de communication (circuit médiatique sans doute investi par des  anciens de l’ENTV, c’est-à-dire les courroies de transmission d’Hamraoui Habib Chawki)  travaillant dans l’événementiel. Sans interférer directement dans la gestion de ces sociétés  privées, le ministère de tutelle professerait une simple assistance, un droit de regard qu’il  compte cependant affermir au niveau de l’École supérieure des Beaux-Arts, de l’İnstitut  supérieur des métiers et des arts du spectacle (İSMAS) et de l’İnstitut de musique, trois  chapelles pédagogiques en telle déperdition cognitive et méthodologique, qu’Azzedine  Mihoubi affirme vouloir les remorquer au développement international des arts  contemporains.  

Naviguant entre un statut d’entreprise et de service public, l’Agence algérienne de  rayonnement culturel (AARC) prévoie elle-même d’intervenir plus intensément dans le  paysage culturel, notamment en multipliant les résidences d’écriture et de musique, en  favorisant l’aspect patrimoniale (musées et archéologie), en affranchissant les arts plastiques  et ceux de la scène de leurs inhibitions. Dès sa nomination, Nazih Benramdane se dira (dans  le quotidien horizons du 10 août 2015) « (…) agréablement surpris par le dynamisme et  professionnalisme » des équipes en place, un staff que rejoindra la plasticienne Meriem Aït el  Hara soudainement nommée chef du département arts visuels. À l’image de celui qui fera du  peintre Rachid Necib le conseiller spécial de Nadia Cherabi-Labidi (alors qu’aucune  publication et compétences notoires ne l’en prédisposait), ce parachutage oblige à se pencher  sur la villégiature parisienne des quinze candidats supposés gagner (aux frais de l’État) leurs  galons de managers culturels et épauler ensuite l’Agence algérienne pour le rayonnement  culturel (AARC). Y transitent des sommes importantes qui profitent largement au cinéma et à  ses réalisateurs exécutants, cela au dépend des projets canalisés sur l’art contemporain,  comme par exemple ceux que nous fournirons, en vain, au directeur du Musée d’art moderne  d’Alger. La cinémathèque lui faisant pratiquement face, c’est également dans celui-ci que (via l’AARC) nous aimerions voir se tenir le séminaire Remettre les pendules à l’heure du street art.  

La nature première de ce courant (street-art) ressort de la contre-culture ou de  l’insubordination, et notre contribution aura par conséquent pour principe de corriger  l’approche folklorique du collectif “Djart 14”. Sa pseudo-biennale de novembre 2014  (autorisée à l’instar d’un “trans-cultural dialogue”) fera en effet surfer le vocable en question  (street-art) sur les traverses juvéniles de l’ “animation culturelle”, c’est-à-dire loin de ses  balises et temporalités transgressives. Projetés pendant le colloque, les films Art war, Les  artistes égyptiens et la révolution et Faites le mur (Exit Through the Gift Shop) replaceront  eux-mêmes le street-art dans son jus et contexte(s), comme le feront à leur manière deux  critique(s) d’art européen(s). En racontant ses expériences de terrain menées à Blida, en  Kabylie ou dans le Sud, le peintre Denis Martinez démontrera que le street-art possède des  ramifications algériennes.  

Pour la partie “étrangère”, nous convierons Ernest Pignon-Ernest (qui livrera à la  connaissance des Algérois, et aux autochtones d’autres villes, une tranche de ses nombreuses  immixtions in-situ), Combo et au possible (cela risque d’être plutôt compliqué) Banksy, ce  nomade de la touche aérosol ayant pris le parti de se rendre à deux reprises en Palestine afin  d’émailler quelques banquises de ses décors. Né en 1974 et originaire de Bristol (Grande Bretagne), Robert Banks ou Robin Gunningham (selon l’encyclopédie Wikipédia) est depuis  le milieu de la décennie 80 une des locomotives du graft. C’est entre 1992 et 1994 que ses  picturo-graffitis antimilitaristes ou anticapitalistes commenceront à défrayer la chronique.

Répréhensibles, car hors-la-loi et conçus sans autorisations, ses profanations provoquent, au  sein du biotope clandestinement occupé, des étonnements et secousses mentales. Outrepassant  les règles établies, l’œuvre de Banksy s’est forgée au sein de la marge anti-guerre, la seule bombe qu’il maniera étant celle servant à combiner installation et slogans, pochoirs et écritures pour mieux faire passer des messages dénonciateurs et perturbateurs mêlant eux mêmes politique, humour et poésie. Séditieux et dissidents, mais cependant non-violents, ils  répondent aux oppressions ambiantes par un hymne à la paix, à la liberté et à la justice, par un mélange d’ironies et d’irrévérences. Animaux et végétaux, inconnus et personnes célèbres,  policiers et soldats en armes serviront souvent à Banksy de modèles ou parangons. Début  juillet 2005, il s’attaquait au mur édifié le long de la “Ligne verte” (voulue en avril 2002 par le gouvernement d’Ariel Sharon) car jalonné tous les 300 mètres de tours de contrôle ou pylônes  (sur lesquels trônent caméras, radars ou détecteurs de mouvements), de tranchées ou de fossés “anti-véhicules”, de pistes de détection ou “anti-incursions”, de routes de contournement, de  grillages ou fils barbelés (03 mètres de hauteur). Cette fortification ou (selon les endroits la  clôture électrifiée) isole la population palestinienne, au point que certaines localités se  retrouvent non seulement complètement coupées de la Cisjordanie et d’İsraël, mais de plus  privées de leurs terres agricoles. Banksy se rendra donc, avec d’autres artistes du street-art  (notamment l’américain Ron English), à quelques encablures de Bethlehem, Kalkilya (ou  Qalqiliya) et Tulkarem (commune et bourgades où se cantonnent les 5% de mur montés en  dur). 

Le jour anniversaire de la condamnation par la Cour internationale de justice de La Haye, les  neuf fresques s’effectueront clandestinement sous le regard quelque peu interloqué de forces  palestiniennes en veille et qui, fusils en mains ou bandoulière, laisseront faire une équipe  obligée d’opérer à la lumière du jour, cela contrairement aux habitus profanateurs des street artistes bravant les interdits la nuit. C’est caméra aux poings, que Banksy retournera fin  février 2015 à Gaza, un territoire d’où il publiera (le 25 à partir de Youtube) le mini documentaire attirant cette fois l’attention sur une zone encore jonchée de ruines. Baptisée  Make this the year you discover a new destination, la vidéo montre plusieurs dessins que le  contrevenant baroudeur fixera sur plusieurs épaves cimentées. On y distingue un chaton  jouant avec une boule de métal, une île paradisiaque en trompe l’œil et une tour de guet  transformée en balançoire pour enfants.

En habillant de tags les amas de résidences détruites par des missiles, l’artiste amenait un peu  d’émerveillement aux gosses traumatisés par les destructions subies lors du conflit de juin juillet 2014. Agressé pour sa part à Paris le samedi 30 janvier 2015 (du côté de la porte Dorée)  pour avoir affiché des convictions pluralistes ou polythéistes, le street-artiste Combo déploie  sur les murs des rouleaux de papiers imprimés qui parlent souvent de la communauté  musulmane, donc d’une France en pleine crise identitaire.

Choisis parce qu’ils occupent chacun, et de façon singulière, une branche du street-art, les  interpellés du symposium Remettre les pendules à l’heure du street-art donneront un aperçu  de leur trajectoire (avec le procédé de leur choix). Denis Martinez divulguera donc les  prolégomènes locaux du street-art, essence que la journaliste Asma Benazouz ajustera, dans  son article “L’art urbain arrive à Alger” (publié le 12 juillet 2015 dans le quotidien  L’Expression) non pas aux années soixante mais à novembre 2014. 

Sa méprise concernera aussi l’action affectée par Youcef Krache qui « La semaine dernière,  (…) a décidé d’exposer ses photos en plein centre d’Alger, muni d’un pinceau et de colle afin de (les) «poster» sur (un des) mur(s) de la rue Ben M’hidi.». Le fait de plaquer (en réalité de la rue Didouche Mourad à la place Audin) 220 clichés rapportant des scènes de vie algéroise,  ne gage pas pour autant d’un esprit frondeur auquel renvoient des sujets dénonçant la torture,  les dictats militaires, les violences exercées à l’encontre de l’intégrité physique des femmes,  etc…  


Si l’occupation que fera de l’espace public l’invité de la dernière Biennale de Bamako ameutera la police (une aventure qu’il s’empressera de relater sur les réseaux sociaux en  spécifiant que son but était de « rendre plus accessible l’art et d’établir une communication,  autour de la photo »), elle n’appartient pas au registre de la subversion underground d’une  tendance (le street-art) qui fera l’objet d’un second papier publié au sein du périodique Liberté du 15 juillet 2015.


İntitulé “Les jeunes artistes algérois investissent les rues de la capitale. L’art urbain arrive à  Alger”, il relatait des calligraffitis du franco-tunisien El Seed, des investissements citadins  accomplis au niveau des façades d’un immeuble, du tunnel des facultés et des escaliers “Arc en-ciel” ou encore du côté de la ville saharienne de Tindouf. 

Si pour l’algérien Ahmed Amine Aitouche, le street-art demeure un reflet « (…) de notre liberté intellectuelle, sociale et culturelle. », il occupe régulièrement les murs du “Jardin  Rouge” (une résidence huppée située à vingt kilomètres de Marrakech et qui abrite douze  mois durant graffeurs et autres pochoiristes) et depuis peu ceux du Musée Mohammed VI de  Rabat. L’institution accrochera (jusqu’au 31 décembre 2015, date marquant, au moment du Festival Jidar, la fin de l’exposition Main street ) sur ses cimaises quelques “spécimens” du  street-art (comme par exemple la fresque que le chilien İNTİ dédiera aux immigrants Subsahariens). Ce dernier y faisait une entrée officielle sur laquelle reviendra le n° 29 (juin sept 2015) du magazine marocain Diptyk, cela à travers une rubrique débutant par cette  question : « peut-on encore parler de street-art dans sa dimension urbaine et illicite quant  celui-ci fréquente les musées et que ses prix flambent ? » L’interrogation ressemble quelque  peu à celle posée en octobre 2014 à Jérôme Catz. Le fondateur des espaces d’art Spacejunk  (dédiés à Grenoble aux artistes du street-art, de la board culture, du lowbrow et du pop surréalisme) relatera pourquoi et comment cet art éphémère se muséifie depuis une dizaine  d’années (la question qui lui fut allouée était « N’y a-t-il pas une contradiction dans la  muséification du street art, par nature éphémère et pirate ? »).  

Le commissaire de l’exposition Street Art, l’innovation au cœur d’un mouvement montée à  l’Espace Électra (Fondation EDF) de Paris déterminera qu’il y a « (…) plus de cinquante ans,  personne ne portait vraiment intérêt à cette expression artistique qui était éphémère et  pouvait dès lors disparaître. C’était dans la logique des choses (…). Avec le temps (…) on  découpe les murs pour les vendre aux enchères et conserver cette trace. Cela s’est produit  pour des dessins de Banksy qui, réalisés dans la bande de Gaza, furent vendus à Art Basel Miami en 2012, lors de l’exposition Banksy Out of Context ». L’auteur du livre Le Street art,  mode d’emploi indiquait que ses dessins soulèvent souvent en Grande-Bretagne « (…) une  levée de bouclier des habitants» car ceux-ci considèrent qu’ils appartiennent à leur patrimoine  culturel. Malgré le vide juridique entourant encore le droit moral ou droit de suite de ce genre de travaux, le marché de l’art leur attribue une très bonne cote, notamment « (…) pour les  personnes nées dans les années 70 », indiquera encore Jérôme Catz. İl confirmera que depuis  une décennie « (…) les choses se sont un peu institutionnalisées», en grande partie grâce aux  expositions de la “Tate Modern” (2008), de “La fondation Cartier pour l’art contemporain ”  où se presseront du 07 juillet au 29 novembre 2009 plus de 80.000 visiteurs venus découvrir  la collection d’Alain-Dominique Gallizia, soit 150 graffeurs, parmi lesquels les pionniers  américains des années 70. Exhibant également les jeunes générations, l’exposition Né dans la  rue-Graffiti traçait les contours d’un territoire qui englobe une multitude de techniques et  d’artistes dont certains se particulariseront en ne produisant plus dans la rue, perdant par là  même leur street credibility. Ce sont eux qu’Alain-Dominique Gallizia fera apprécier du 12  mars 2015 au 13 septembre 2015 à la Pinacothèque de Paris (28, Place de la Madeleine,  75008), cet espace ayant branché ses projecteurs sur Le Pressionnisme ou Pressure Art, un  mouvement condensant un savoir faire qui consiste (par distanciation, vitesse d’exécution et  inclinaisons) à appliquer les poussées adéquates (bonne largeur et densité du trait) sur la  capsule d’une bombe aérosol. Couvrant deux décennies (1970-1990), l’exposition mettra en  lumières un courant éclos il y a quarante ans dans les métropoles américaines. Passant du  figuratif au wild-style et regroupées en Union des artistes de graffiti ou en crew (sorte de  confrérie), ses principales têtes de pont manifesteront leur besoin de reconnaissances et  identifications sociologiques via des joutes ou défis artistiques et dès 1972 sur des toiles accaparées par quelques rares galeries newyorkaises. 

Le dédain renvoyé à leurs égards par la critique encartée les isolera des publics. Mis à part  celles de Keith Haring ou de Jean-Michel Basquiat, leurs abstractions (parfois calligraphiée)  ne convaincront pas les musées et seule une poignée de collectionneurs se réserveront des  œuvres confectionnées en atelier. Ce fut le cas d’Alain-Dominique Gallizia dont les  collections rassemblées au Grimaldi Forum de Monaco formalisaient déjà l’avènement du  Pressionnisme, un art « sous pression de la bombe, loi, de la rue et de la compétition entre les  artistes ».


Le principe de la Battle de graffiti (terme issu du grec Graphein puis de l’italien graffito qui  signifie écrire et peindre) sera repris par le Meeting of style (MOS) né à Wiesbaden (sud ouest de l’Allemagne.) lorsqu’au début des années 1990, des graffeurs se sont appropriés un  abattoir désaffecté (eh oui !). Pour résister à sa destruction, les occupants du “Graffiti Hall of  Fame” coordonneront la première concentration internationale des arts de la rue, laquelle  donnera naissance au Festival international de graffiti itinérant. Commencée en mars 2013  par la Chine, la tournée mondiale se poursuivra en Grèce, Allemagne, Pologne puis en  périphérie de Perpignan (les 20 et 21 juillet), là elle revenait pour sa 6ème édition, mais cette  fois au centre culturel “Casa Musicale” (du 18 au 26 juillet 2015).


Sous l’égide de l’Union internationale de la street-culture (UİSC), les programmateurs  soumettront, sur près de 1200 m², un panel de pratiques artistiques et sportives. Venus  d’horizons différents, une cinquantaine d’artistes nationaux et mondiaux achèveront des  œuvres en live au sein d’une “Free zone” de 300 mètres carrés octroyant aux visiteurs la  possibilité de s’essayer au graffiti, tag ou graff. Le Meeting of Styles (MOS) de Perpignan  instituera des stages initiatiques, des concerts de hip-hop, des contestes de skate park, de la  danse Hip-hop, une variété reconfigurée du 28 avril au 26 juillet 2015 à l’İnstitut du monde  arabe (İMA) avec l’exposition HIP-HOP, du Bronx aux rues arabes. Orchestrée par le  rappeur marseillais Akhenaton, elle ajoutera un volet cinéma et mode de manière à mieux  rendre compte de l’étendue esthétique du street-art, de retracer les divers composants d’une  culture urbaine apparue en France dans les années 1980.  

 

En recevant dès 2011 la monstration Art in the Streets, le Museum of contempory art  (MOCA) de Los Angeles devançait la Fondation EDF qui du 04 octobre 2014 au 1er mars  2015 brossera le panorama des usages, codes et pratiques du street-art, soit les différents  aspects d’un courant s’épanchant en light painting ou street-mapping. L’historique de Jérôme  Catz s’arrêtera à des années 2000 envahies par les smartphones, ordinateurs, tablettes et  surtout Internet, donc par une immense toile qui aura fait bougé les lignes d’un mouvement  jusque là cantonné aux quartiers. Depuis, bombes et pochoirs ont été suppléés par le traceur,  le QR code, le stylet, la caméra numérique ou la vidéo projecteur. Boostée par les avancées  technologiques, l’évolution des 45 dernières années a fortifié la relation public-street-art, une  interaction que le Musée d’art moderne d’Alger (MAMA) devrait à son tour mettre en focus  via donc un projet que nous modérerons, ne serait-ce que pour s’arrêter sur l’expression  (typiquement algéroise) de “diki” (squat).  

Elle caractérise un univers social où, cherchant d’une part le “khelwi” (la paix de l’esprit) et  d’autre part à ne pas « (…) se faire happer par le vide culturel», des jeunes ou pré-adultes  pratiquent le rap, hip-hop et s’essayent à l’art du tag. S’étant intéressé de près à celui-ci, nous  projetterons en avril 1987 (au sein de l’École supérieure des Beaux-Arts d’Alger) une série de  graffitis, picturo-graffitis et pochoirs, une intervention que nous réitérerons en faisant cette fois profiter l’assistance de mille autres diapositives. Prises à Paris ou aux abords de sa proche  banlieue, elles datent de la fin des années 80 et feront découvrir (probablement à partir d’un  film accompagné de musiques) des œuvres aujourd’hui détruites ou effacées, des disparitions  qui posent le problème de leur conservation et dégradation. Après les dommages causés à  Park City (État de l’Utah) sur deux pochoirs de Banksy (peints en 2010 au Festival de  Sundance), un Américain dû payer une amende de 13.000 dollars (11.112 euros) pour éviter la  prison. La somme permettra de les restaurer et de les protéger de nouveau par une vitre en  plexiglas. En ce qui concerne la préservation des œuvres du street-art, certaines sont  prémunies des agressivités météorologiques, notamment à Philadelphie où les autorités  mettent « (…) les moyens nécessaires en place pour les protéger ». À Paris, le maire du XIIIe arrondissement, Jérôme Coumet, agira en collaboration avec Medhi Ben Cheikh connu pour  avoir (avec l’accord du bailleur İCF Habitat La Sablière) mobilisé du 1er au 31 octobre 2013  plus d’une centaine d’artistes (de 15 nationalités) du street-art disposés à investir La tour  Paris 13 et ses 4.500 m² de surface au sol (soit 09 étages et 36 appartements de 04 à 05  pièces).  

İnstallée depuis 2004 à deux pas des quais de Seine et de la Bibliothèque François Mitterrand,  sa galerie possède des cloisons en béton brut de six mètres de hauteur, une amplitude  autorisant des wallpaintings. Préférant sortir des accrochages traditionnels, Ben Cheikh  s’engagera “Hors les murs” pour offrir aux Tunisiens de Djerbahood un musée à ciel ouvert  (la manifestation s’intitulait Djerbahood, le graffiti est sur le devant de la scène). La Mairie  de Paris lui demandera à ce titre de contacter ses habituels voyageurs afin qu’ils badigeonnent  (dès le lundi 1er Juin 2015) 220 panneaux en bois (là aussi éphémères) fixés sur les garde corps du Pont des Arts en remplacement des “cadenas de l’amour”.  

Malgré l’activisme de ses orientations in-situ, nous n’apostropherons pas le propriétaire d’  “İtinerrance”, car les globetrotters qu’il met en représentation(s) ne se distinguent pas à nos  yeux suffisamment de ce qui tant à se sédentariser sur les murs de toutes les mégalopoles.  Lorsque Paul Ardenne, le critique auteur de 100 artistes du street-art, acceptait de couvrir  (pour la radio France-Culture) la rétrospective que le Musée d’art moderne de Paris consacrait  (du 19 avril au 18 août 2013 et avec le concours du “Centquatre”, qui abritera une quinzaine  de grands formats) à Keith Haring, il savait parfaitement, en tant qu’historien épris de l’art en  contexte réel (c’est-à-dire l’art d’implication sociale directe), que les iconographies du  newyorkais dégageaient une singularité symbolique et archétypale. Elles se démarquent  encore aujourd’hui de celles confectionnées par le collectif algérien “Le 213 writers” (formé  en novembre 2014, il rassemble des graffeurs de plusieurs wilayas) singeant des gammes  graphiques partout identiques et reconnaissables. Ahmed Amine Aitouche ne fera pas  exception à ce recopiage généralisé, ses calligraffitis (visibles sur la Placette Ben Boulaïd  d’Alger-Centre) ne dérogeant pas à ce qu’arborera l’exposition HIP-HOP, du Bronx aux rues  arabe ou la dite Biennale pluridisciplinaire Djart 2014 soutenue par l’Agence algérienne pour  le rayonnement culturel (AARC).  

En acceptant le séminaire Remettre les pendules à l’heure du street-art, elle contredira ceux  qu’elle recevait une année plus tôt mais pourrait aussi découvrir le dénommé Adel D. Agé de  65 ans, ce retraité de la Caisse nationale d’assurance sociale (CNAS) vit dans un quartier  populaire qu’il tente d’agrémenter en inscrivant depuis plusieurs mois des poèmes sur les  murs de la cité oranaise de Dar El Hayet. Au bas des barres d’immeubles, ses syntaxes  (comme par exemple “Dar El Hayet, tablette à la sauvette, et casquette sans casse-tête”)  dénoncent une jeunesse allant à vau-l’eau ainsi que le foutoir commercial qui envahit  régulièrement le marché de M’dina J’dida, là où les “trabendistes” étalent à même le sol leurs ustensiles et marchandises. Après quelques vetos préventifs, ce laisser-aller a été de nouveau  toléré suite aux pressions (cette fois verbales) de fondamentalistes religieux que Cherifa  Kheddar met souvent en cause en remémorant le souvenir de femmes violées et/ou  assassinées pendant la “Décennie noire” ou “Décennie tombale”. Ce type de rappel restant (au  nom du Grand Pardon entériné en 2005) tabou, elle sera (le 08 mars 2015) frappée par un  officier de police puis arrêtée pour avoir donc osé interpeller l’opinion publique avec des  affiches composées à partir de photos de disparues. 

Bien que la photographie ait gagné les considérations du Musée d’art moderne d’Alger  (MAMA), Mohammed Djehiche n’osera jamais introduire les scénographies urbaines de la  secrétaire générale de l’association “Djazairouna”, pourtant révélatrice d’une expression du  sensible largement concurrentielles à celles des graffeurs émergents mais trop politiquement  incorrectes pour remplacer à l’avenir le mobilier organique et les clinquants objets du sérail  zoubirien. Elles resteront sans doute également “imagea non grata” pour les Musées d’art  moderne et/ou contemporain de Constantine et d’Oran qui, privés de scénaristes, d’un  personnel compétent, de rédacteurs et de revues, etc…, ne se risqueront certainement pas à  contrarier une certaine rahma (clémence) bouteflikienne, celle-là même qui, bannissant,  censurant ou prohibant au nom de l’illicite ou du licite, étouffe la liberté d’expression et  impacte par conséquent directement la création artistique.  

La Concorde nationale remettra en selle Madani Mezrag, l’ex-émir de l’Armée islamique du  salut (AİS), l’antichambre d’un Front islamique du salut (FİS) autorisé à refaire surface sous  couvert du Front de l’Algérie pour la réconciliation et le salut (FARS). La ficelle est grosse et  la farce (ou FARS) aussi amer que la paranoïa maladive de Zoubir Hellal, dont les  manigances incitent à se demander : sur l’échiquier des manœuvres interlopes, il est  finalement le pion usurpateur de qui, de quelle fraction de la domination symbolique ?

CONCLUSİON 

La loge en activité souterraine en Algérie lorgne avec promptitude sur les salles de cinéma, un  parc d’autant plus captivant que, à l’opposé du “Dismaland” de Banksy (à l’ouest de  l’Angleterre, proche de Bristol, le street-artiste a récemment implanté au milieu et aux  pourtours d’une ancienne piscine découverte, de la station balnéaire de Weston-super-Mare,  un parc d’attraction parodiant ceux de la firme Disneyland), il génère de rapides rendements  lucratifs pour les réservistes issus de l’Établissement public de télévision algérienne (ÉPTV ou  ÉPTA). Membre actif du Centre méditerranéen de la communication audiovisuelle (CMCA),  et érigé depuis 1991 en Établissement public à caractère industriel et Commercial (ÉPIC), ce  temple cathodique est investi d’une mission de service public consistant à informer, éduquer et  divertir via les chaînes hertziennes (1, 4 et 5) ou les satellitaires “Canal Algérie” et “Algérie  03”, à garantir les valeurs de partage, de solidarité et de fraternité propre à l’instauration de la  Charte pour la paix. Subventionné à hauteur d’environ quatre-vingt (80) millions d’euros, il  engendre des ressources publicitaires toutefois insuffisantes pour la conception, diffusion et  distribution des programmes, ce qui l’oblige à recourir à des anciens de la Maison devenus  des producteurs indépendants. Agissant aussi en quinconce avec l’Agence algérienne pour le  développement culturel (AARC), certains d’entre eux pourraient se retrouver bientôt les  partenaires privilégiés de festivals à optimiser (en raison donc d’un budget d’équipement que  ne souhaite plus subventionner l’État-providence) et pourquoi pas les nouveaux gestionnaires  des “salles noires” que le ministère de la Culture compte faire tomber dans son escarcelle et,  par un subtil prolongement (loin d’être neutre), au sein de celles des sponsors maintenant  autorisés à investir dans le paysage culturel. S’y sont incrustés depuis une quinzaine d’années  toute sorte d’autres opportunistes pressés de boire à la source fructueuse d’un robinet coulant  à flops. Le débit s’amenuisant, les crocs s’aiguiseront d’autant plus chez les mordus de  l’assistanat ou des “mégas” manifestations politico-symboliques ou emblématico diplomatiques dont a copieusement profité Hellal Zoubir. Roi au pays des aveugles, il tourne  de l’œil et tire en cachette sur tous ceux qui seraient susceptibles de lui faire de l’ombre.  

Au lieu de consolider une œuvre picturale contribuant indéniablement (dès 1989) à  l’élargissement du champ artistique, il se fera le relais de la dimension quantitative plombant  l’essor d’une éthique de singularité déjà passablement contrariée par l’absence d’espaces  d’exposition. C’est d’ailleurs ce désert qui infléchit l’incompréhension d’abord éprouvée à  l’annonce du poste de chef du département arts-visuels occupé (au sein de l’Agence  algérienne pour le rayonnement culturel) par Meriem Aït el Hara. L’assise financière que lui  fournit cet emploi compense le manque de revenus réguliers chez une personne dont l’appréciable production plastique ne trouve malheureusement pas preneur(s), puisque difficile d’accès pour des acheteurs férus de chromos néo-orientalistes. Faisant un constat  similaire, l’écrivaine et militante féministe Wassyla Tamzali accommodera à la fin du mois de janvier 2015 une expo-vente au sein de son appartement algérois, y concentrant les œuvres de  Maya Benchikhelfegoun, Mehdi Bardi Djelil, Sofiane Zougar, Adel Bentounsi, Djamel  Agagnia et Fella Tamzali (sa nièce). Priée le 16 juin 2015, par la radio France-Culture, de livrer son avis sur la visite éclaire de François Hollande à Alger (celle effectuée la veille),  l’ancienne avocate et missionnée de L’UNESCO louait alors la stabilité politique d’Abdelaziz  Bouteflika après avoir dénoncé en avril 2014, devant l’ambassade d’Algérie à Paris, l’arrangé  quatrième mandat.  

Probablement insufflé du côté de la diplomatie hexagonale, son renversement de veste est  significatif d’une intelligentsia se satisfaisant du climat convivial de l’ambassade de France  dans l’optique de capitaliser des dividendes, ceux-ci pouvant venir d’une future désignation protocolaire, puisque l’Algérie devrait, après la Tunisie et le Maroc, être le prochain invité  culturel de l’İnstitut du monde arabe (İMA). Faute de chercheurs en mesure de rendre  pertinent le tableau ou répertoire symbolique du champ artistique, le premier venu peut  allégrement se retrouver commissaire de la prochaine manifestation envisagée au niveau de  l’édifice que gouverne Jack Lang, d’autant plus si son patronyme fait partie intégrante des  petits papiers officiels. Ce n’est pas notre cas. Lorsqu’en décembre 2012 (au moment du  séminaire “L’art et l’engagement politique” préparé au MAMA), Nelson Herrera Ysla, le  directeur du Centre d’art contemporain de la Havane, rapportera son vœu de nous confier la  tâche de choisir les participants de la XII° Biennale prévue (du 22 mai au 22 juin 2015) dans  la capitale cubaine, il se verra vingt-quatre heures plus tard contraint d’annuler sa prévision.  Ce revirement aura pour conséquence la carence de prétendants algériens, remplacés par  Mohamed Bourouissa (de la galerie parisienne Kamel Mennour) et Didier Faustino. La délégation de chaque pays étant restreinte, le plasticien représentera donc l’Algérie tout en  demeurant par ailleurs l’hôte de l’İnstitut français de la Havane, lequel institut introduira  Daniel Buren et Henri Tauliaut, soutiendra les jeunes artistes Steeve Bauras et Philippe  Echaroux, ainsi que les projets collaboratifs d’Olivier Bosson et de Narimane Mari ou encore  des étudiants de l’École nationale des Beaux-Arts de Lyon.  

Perchée sur les hauteurs de la rue Didouche Mourad, celle d’Alger doit impérativement se  reconvertir en nid créateur, afin que les prochaines promotions occupent ultérieurement et à  bon-escient les trois musées d’art moderne et/ou contemporain. Cette perspective ne peut  résolument trouver ses cohérences que si le dit établissement s’allège des départements arts  décoratifs et arts musulmans (auxquels il y a lieu d’attribuer un autre endroit que le Parc  Zyriab, donc deux nouveaux bâtiments), que si, une fois rendu à César ce qui appartient à  César, la triplette Yahiaoui Mohamed (dit Yamo), Medjeber Cherif et Abdelkader Abdi  encourage, avec l’aide d’apports publics et privés, la naissance d’une Académie du design,  inspirée de la Cité stéphanoise qui recevait du 12 mars au 12 avril 2015 la 9ème Biennale  internationale design. En tant que médiateur culturel, Mohammed Djehiche avait alors à saisir  au vol l’appel à candidature lancé par les organisateurs, d’autant plus que la thématique était  justement basée sur : Les sens du “Beau”. Nous verrons bien s’il appuie ou pas le colloque  Remettre les pendules à l’heure du street-art. 

Saâdi-Leray Farid.
Sociologue de l’art Perpignan.
le 31 août 2015.

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