Pour sa seconde exposition en solo à la Seen Art Gallery, L’homme Jaune nous revient en mettant en scène une sorte de chronique de l’actualité, l’artiste s’amuse à dévier les anciennes publicités pour dénoncer les dérives de notre société, tentant d’éveiller les populations à de réels questionnements, une pratique artistique qui s’affiche aujourd’hui comme porteuse de sens.
Multiples modes d’expression et techniques graphiques qui permettent à tous de trouver un accès immédiat à l’œuvre. Cette démarche vers les autres qui, souvent pousse tout un chacun à s’interroger sur l’évolution de notre monde, de manière malicieuse et ironique, ne laisse jamais indifférente. L’artiste nous confie « je pratique un art actuel et vivant, le seul art à la fois mondialisé et local, nomade et populaire… » de plain-pied dans notre époque… un art qui touche le peuple.
L’artiste s’affranchit en effet, et avec talent, des carcans d’un art contemporain complexe aux démarches si intellectualisées qu’elles ne sont plus accessibles qu’à une infime minorité, développant une écriture qui se nourrit certes de l’histoire de l’art mais aussi de sociologie, du temps présent, de l’intime, exprimant de façon apparemment récurrente, de nouvelles valeurs.
Un message profond, formulé comme pour symboliser le danger d’une civilisation qui s’efface. Au moment où nous nous interrogeons sur la perte de repères, ces œuvres expriment notre désarroi face à un avenir incertain.
Le rôle de la nostalgie dans la mémoire artistique, même lorsqu’il s’agit d’un passé contemporain, fait naître différents regards: social, commercial, politique. Cette mise en pratique mémorielle esthétique permet d’esquisser une vision plus accessible du passé. Au centre de cette expression, des codes touchant à un passif collectif.
Plusieurs artistes plasticiens contemporains dont l’objectif est de contribuer à l’élaboration de ce qu’appelait Ricœur la « juste mémoire», se sont laissés portés par de telles recherches et l’homme jaune s’inscrit dans cette mouvance.
Cependant, si dans un premier temps, les compositions, les couleurs poussent à s’approprier l’œuvre comme un bel objet, visuellement chatoyant, plus on y accède, plus cet esthétisme s’avère grinçant, menaçant. C’est un cri d’alarme, souvent trash, qui symbolise à la fois le progrès mais aussi la menace sur l’environnement et donc la crainte des lendemains. Le choix des visuels, le mixage des techniques et des graphismes flatteurs rendent d’autant plus percutants les messages, pour la plupart empruntés à une période de notre histoire où se mêlent des conventions mondialistes aux sujets puisés dans une quotidienneté Algérienne davantage actuelle, dont aucune thématique, politique, religieuse, ou encore écologique, n’est exclue.
En résumé, nous voici face à un artiste engagé, inspiré par les codes visuels de la publicité, de la propagande politique et industrielle de l’après-indépendance, qu’il détourne pour interpeller et donner naissance à un discours contestataire qui interroge nos sociétés, sur leur évolution, les questions de domination, le racisme et d’ostracisme.
Un retour en force qui se promet d’être passionnant.
Rendez-vous le 16 Novembre 2019
Lieu : Seen Art Gallery (Alger)