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Samsom Ismaïl (1938 – 1988)

Samsom ismaïl est né à Belcourt, Alger au sein d’une famille aisée, son père étant musicien et sa mère d’une mère artisane brodeuse, ilfait ses études secondaires à l’école Sarrouy puis au lycée Émir Abdlelkader actuellement (ex‑Bugeaud). Il est ensuite instituteur pendant une année. En 1953, il entreprend un voyage en Tunisie, en Europe, aux Antilles et en Amérique latine. Une balle tirée dans le dos en 1957 provoque la paralysie de ses membres inférieurs. Ismaïl Samsom rentre en Algérie au début de l’année 1960 et peint des œuvres aux couleurs sombres et violentes. Sa première exposition personnelle est présentée en 1968 à la galerie de l’UNAP et il obtiendra en 1969 le Grand prix de la ville d’Alger. Il est lauréat de plusieurs concours nationaux et titulaire de la médaille d’honneur pour les arts plastiques.

Figuratif convaincu, il exprimait les scènes de la vie populaire. Il s’installe en Suisse en 1981. Plusieurs timbres émis par les Postes algériennes ont été créés par Samsom, « Année internationale de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale » (1971, 0,60 DA), Constantine (1972, 3 DA), deux autres reproduisent en 1996 des peintures, Femme au pigeon (20 DA) et Interrogation, également titrée Jeune fille au chien (30 DA). Son nom a été donné en 1991 à la galerie du théâtre de verdure d’Alger et en 2005 à un prix de peinture. Une exposition rétrospective de son œuvre a été présentée au Musée des Beaux-Arts d’Alger en . Ismaïl Samsom meurt dans la nuit du 4 au  à Alger.

 


De gauche à droite, Samsom Ismaïl, en compagnie des plasticiens Hioun Salah, Ziani Hocine. Source photo : Farida Khelifi (Galerie Thevest)

 

Le peintre des joies intimes de la Casbah par Ali El Hadj Tahar

Ismaïl Samsom dessine depuis son enfance mais il ne viendra à la peinture que sur le tard. Il est d’abord instituteur, avant de se lasser de ce métier et de s’installer en Tunisie. Son tempérament, sa curiosité et son goût de l’aventure l’amèneront à faire des voyages en Europe, aux Antilles et en Amérique du Sud.

Après son périple, il revient à Alger pour repartir en France, en 1953. A la Casbah, il est victime d’un accident en 1957, avec pour conséquence la paralysie de ses membres inférieurs. Ce drame le pousse vers une autre quête, intérieure celle-là : la peinture, pratiquée en autodidacte. De retour en Algérie en 1960, il organise sa première exposition personnelle à la galerie de l’UNAP, en 1966.

D’emblée, sa peinture est l’expression d’un homme blessé qui cherche à accomplir son cheminement et sa quête à travers un art susceptible de donner un autre sens à sa vie. Il s’investit dans l’art avec la même fougue qui l’animait avant l’accident qui l’a condamné à une chaise roulante. La passion de croquer la vie à pleines dents se transforme en besoin irrépressible qui fera très vite évoluer son art sur le plan technique, d’autant que la sensibilité et la culture de Samsom l’y prédisposent. D’emblée, son sujet est l’Humain ; et plus particulièrement la femme et l’enfant. Évidemment, Samsom a trouvé en la thématique issiakhémienne une matière où il s’identifie pleinement et qu’il cherchera à enrichir de sa propre expérience, de ses propres aspirations et idéaux. La touche et les préoccupations personnelles ne tardent pas à apparaître dans ses œuvres qui respirent la tendresse, la bonté et l’humilité.

En 1967, il obtient le Grand Prix de la ville d’Alger et continuera à approfondir son travail en restant fidèle à sa thématique première. La lumière et la joie animent sa vision. Et contrairement à Issiakhem, ce n’est pas l’expressionnisme qu’il cherche car Samsom ne traite pas de la condition humaine dans ce qu’elle peut avoir de pénible ou de tragique.
Il voit plutôt la vie sous son angle positif et heureux, en essayant de mettre en valeur la joie, sinon la douceur de vivre ainsi que la beauté des femmes et la candeur des enfants. Ses femmes sont fortes et vigoureuses et respirent la santé, tout comme les enfants aussi et même les animaux, très présents dans cette peinture. Guidé par un humanisme serein, Samsom admire autant Picasso que Cézanne ou Paul Klee mais il ne tombe sous aucune influence, pas même celle du symboliste Gustav Klimt avec qui il a beaucoup de similitudes techniques.

Les intérieurs de Samsom sont gais et ses femmes sont épanouies. Elles sont souvent entourées d’enfants et d’animaux domestiques, tels que chats, chiens et oiseaux. Ici, peindre semble également être une sorte de thérapie qui aide à oublier le drame pour retrouver l’enfance et une jeunesse heureuses et insouciantes. Samsom s’intéressera aussi aux paysages et aux natures mortes traités comme des sujets dignes d’être peints au vingtième siècle. D’ailleurs beaucoup d’artistes d’aujourd’hui continuent à les traiter avec un esprit et une touche modernes. Pleine de sensibilité et de fragilité, son œuvre est parfois marquée par une certaine tristesse, voire un spleen qui n’ont rien de pesant. Chaude et lumineuse, cette peinture se veut un hymne à la vie et une louange à toutes les belles choses qui nous entourent et qu’un pinceau ne peut toutes répertorier, se contentant de décrire une fête de mariage par-ci, un jeu d’enfants par-là, une rencontre au hammam, un groupe de danseuses, des fillettes en train de s’amuser, un enfant avec son chat…

Ismaïl Samson est l’un des premiers peintres algériens à aborder les paysages urbains algérois d’une manière qui n’a rien à voir avec la mode orientaliste et classique encore en vigueur dans la peinture algérienne des années 1970 et dont les principaux représentants étaient Abderrahmane Sahouli, Mohamed Zmirli, Mohamed Hamchaoui, Mohamed Chegrane et Mohamed Nedjar. Attaché aux traditions, c’est la Casbah et ses gens qu’il peint surtout, fidèle aux îlots de maisons basses traversées par des ruelles qui montent en dédales d’escaliers : des femmes avec leurs emplettes à la main, des enfants qui jouent ou qui vont à l’école, des fillettes s’amusant dans une ruelle, et autres scènes bigarrées…

Refusant l’exotisme, car, disait-il : « Je ne veux pas une Casbah documentaliste mais une Casbah de cœur », Samson est loin des images d’Épinal qui embellissent la réalité. Les tons bistre, les ocres et les gris sont d’ailleurs très présents chez cet artiste qui a peint un Vieil Alger tout simplement humain, avec des gens vaquant à leurs activités quotidiennes, où une femme en haïk et au visage couvert d’une voilette de soie vous donnerait peut-être envie de la suivre dans l’espoir qu’elle dévoile son visage, vous laissant voir à quel point elle est belle. À son sujet de prédilection, Samsom a consacré de nombreuses toiles dont Casbah éternelle, Terrasses de la Casbah, Casbah de nuit, Coin de Casbah, Port d’Alger. Et toute son œuvre est chargée de sensibilité et de tendresse même si parfois on y dénote une dose de mélancolie et de tristesse. Essentiellement travaillée au couteau, sa peinture évoque certains aspects de l’impressionnisme notamment cette sensation que les paysages, les personnages et les objets sont traités de manière parcellaire qui fait que chaque touche sépare et relie en même temps des éléments disparates.

Évidemment, Samsom n’a rien à voir avec ce style ; et ses sujets sont sempiternellement baignés de lumière et ne nous font jamais oublier qu’ils traitent de l’Algérie.
Dans ses scènes de vie quotidiennes comme dans ses personnages, il met toute la tendresse qu’il a pour sa société et pour l’humanité d’une manière générale. Pourtant lorsqu’il s’installera en Suisse, il sera plus attentif aux paysages qu’aux Hommes. Les petits formats réalisés dans ce pays marquent la rupture avec la technique du couteau et avec la touche carrée à la Klimt.
Dans ses paysages suisses, il laisse pleinement s’exercer la finesse de son dessin et ses subtilités de couleurs : les gris, les blancs, les roses et les bleus tendres s’approprièrent sa palette désormais consacrée aux sites enneigés, aux forêts giboyeuses, aux maisons cachées sous les bois… Mais ce sont ses œuvres de la période algérienne, avec leurs paysages inondés de soleil, leurs fruits mûrs, ainsi que les femmes et les enfants du pays qui traduisent le travail de cet artiste tout aussi vrai que son œuvre.

Ali El Hadj Tahar
6 juil. 2020
source :  http://lecourrier-dalgerie.com/

 

 

 


Témoignages

 «… Grâce à son amour du dessin, et, fort de tous ces points de repères, dont il avait conscience, il s’était fixé un but pour bâtir un univers propre à lui, et, être partie prenante de son évolution en élaborant son propre langage pictural et plastique… Combinant sensibilité, impressions, et authenticité, il préparait ses compositions avec une surprenante facilité prenant un soin méticuleux dans le choix de ses matériaux. Malgré toutes les influences qu’il a subi au fil des années, Ismaïl est parvenu grâce à son sens inné pour le dessin, la richesse de son imagination, ses rêves et ses fantasmes, à créer des œuvres bien personnelles. Il était toujours désireux d’enrichir ses acquis, à voir le monde d’un regard sans préjugés, sans complexes et aussi plein d’espoir et une rage de vivre qui l’animait à chaque instant. … Ismaïl a vécu une émouvante histoire d’amour avec la peinture. Elle lui a appris à exister, à aimer et, à accepter les autres avec une profonde conviction… » Aïcha.Merazka Hioun, «Témoignage d’un ami », 2002.

 

 «… Samsom était un peintre totalement instinctif, ne faisant pratiquement jamais d’études ou d’esquisse pour ses œuvres. Il commençait par jeter ses couleurs sur une toile et s’engageait dans une exploration créative. En fait, il exploitait les formes du hasard pour leur donner une vie. Il disait toujours qu’il partait d’une abstraction pour atteindre une forme très figurative. …Comme chez tous les artistes de la Casbah, celle-ci joue un rôle prépondérant, dépassant de loin les rapports de l’individu avec ses lieux d’enfance. … Chez Samsom elle prendra une dimension de paradis perdu, puisqu’il ne pouvait plus y gambader, sentir ses odeurs et ses palpitations. Il la fait revivre constamment en la peignant et repeignant. A la fin des années soixante dix, il commença à développer une nouvelle approche de la miniature, utilisant des techniques mixtes pour réaliser des œuvres de petit format avec une multitude de détails, un travail tout en préciosité et en précision mais se libérant du cadre enluminé et des formes répétitives. Il restera ce peintre du soleil. » (Extrait article de Mustapha Flici, « Ismail Samsom, le peintre du soleil », 2002.

 

 «La mère l’initia au dessin à travers ses travaux de broderie, de r’cham et de tarz. Aussi, c’est grâce à la peinture qu’il a pu exorciser les méandres de ses tourments, ouvrant ainsi les portes de son subconscient pour en extraire les plus belles oeuvres d’art, lesquelles sont les témoins ou le reflet d’un sentiment enfoui ou d’une émotion révélée sous différentes techniques picturales (huiles sur toile, dessins et miniatures). (…) allant du figuratif à la miniature en passant par l’art surréaliste qui capture le regard par le côté à la fois onirique et serein qui se dégage de lui. Peintre du «soleil» ou de «la préciosité» comme se plaisent à l’appeler les critiques, Smaïl Samsom était et restera avant tout ce peintre qui mettait tout son «coeur à l’ouvrage». Les croquis qui fleurissent sur ses différents carnets témoignent de ce profond désir d’inscrire ou de dessiner la vie en couleur, de peindre l’existence et son entourage comme il le sentait. » … (Extrait d’un article de O. Hind « Le rêve d’Ismaïl Samsom revisité… », L’Expression » le 24 fevrier 2002.

 

 «… Puiser ses sujets aux limites premières du conscient n’exclut pas chez Samsom, un processus créatif que son psychisme, nourri de l’épreuve, organise. …Casbah, terrasses, femmes, oiseaux en plein essor, certes… Il arrive que la représentation acquise se heurte à des résistances inconscientes. Les personnages qui contemplent un lointain inaccessible et diffus, les circonvolutions brumeuses, immatérielles, les femmes accoudées à des parapets qui semblent suspendus à un espace imaginaire, les oiseaux dont l’envol se perd, traduisent de douloureux méandres où se mêlent le désirable et l’interdit…  » Mahammed-Orfali Dalila, Catalogue rétrospective Samsom Smail au Musée national des beaux-arts, 2002.

 

«… Malgré de nombreuses influences, il resta attaché à des œuvres personnelles. Qui ne reconnaîtrait-il pas son style ? Aux environs d’Alger, à la Madrague El-Djemila, il trouvait une source d’inspiration, se nourrissant de couleurs, de soleil, d’horizons bleus et de senteurs marines. Ne l’a-t-on pas surnommé “Smaïl le marin” ? Infatigable, il réunissait ses amis dans son appartement au 3e étage d’un immeuble de la rue Waisse (au-dessus du cinéma le Triomphe) où il excellait dans l’art culinaire, jouant de la guitare, du tar et de la derbouka… » Omar Kehouadji, Evocation: Smaïl Samson, les vagues du silence. in Liberté, le 9 juillet 2011.

 

 


Smail samsom dans son Atelier. Source photo : Farida Khelifi (Galerie Thevest)

 

SAMSOM LE CRÉATEUR DE TIMBRE

Le 27 mars 1971, l’artiste-peintre Ismaïl Samsom signe l’illustration de son premier timbre-poste réalisé à l’occasion de l’« Année internationale de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale » (1971, 0,60 DA). Un bon début, avec un dessin hautement symbolique. Ismaïl Samsom avait à l’époque 37 ans. Plusieurs timbres émis par les Postes algériennes ont été créés par Samsom par la suite, notamment :

Journée du Timbre 1972. Timbre du 22 avril 1972.
Journée du Timbre 1973. Timbre du 20 janvier 1973.
10 ème anniversaire du Programme alimentaire mondial (PAM).
20 ème Anniversaire de la Révolution 1954-1974.
Solidarité avec le Peuple Sahraoui. Timbre du 13 mars 1976.
Les cavaliers. Timbres du 23 juin 1977.

 



le 25 décembre 1996, une émission de deux timbres illustrant deux de ses œuvres conservées au Musée national des Beaux-Arts d’Alger sont édité par la poste algérienne la Poste algérienne, Femme au pigeon (20 DA) et Interrogation, également titrée Jeune fille au chien (30 DA).

Smaïl Samsom figure aussi dans une série de quatre timbres parue en 2015, réalisée par Kamreddine Krim, consacrée aux hommes de culture dont Mouloud Feraoun, M’hamed Issiakhem et Abdelhamid Benhadouga.